« Je suis convaincue que la vie est une fête. C’est à nous d’éloigner ces nuages. Nous avons assez d’amour et de richesses pour que tout le monde vive dans la dignité ».
Celle qui parle ainsi a pourtant vécu l’horreur lors du massacre de Tutsis par les Hutus. Le 24 octobre 1993, en pleine guerre civile, Maggie est réfugiée avec 72 personnes dans un évêché. Des hommes armés font irruption et exécutent tous les adultes, sauf elle et 25 enfants. Décidant alors que « la haine n’aura pas le dernier mot » et que l’amour sera plus fort, elle prend en charge les 25 enfants restés orphelins et fonde la Maison Shalom » établie à Ruyigi (Burundi) qui a déjà accompagné plus de 20 000 enfants depuis 1994. Un magnifique exemple de résilience au-delà de la violence!
Voir d’autres détails dans notre dossier.
La vie demeure souvent de la « survie » pour nombre de femmes victimes et assujetties à une culture d’abus où la violence les emporte loin du meilleur d’elles- mêmes.
Les antennes de Paix proposent cette semaine quelques témoignages de femmes dont la sortie des tombeaux de la victimisation peut nous inspirer à marcher à l’air libre et la tête haute.
Toutes ces femmes résilientes ont dû lutter chacune en puisant en elles-mêmes avec d’autres, pour garder saine leur identité profonde et reprendre leur vie en dépit des altérations subies.
Leurs marques souvent visibles mais assumées deviennent désormais tracés de lumière et lieux inspirants pour nos propres traversées.
L’enjeu demeure toujours la Paix: passées de l’insoutenable violence à une paix étonnante de fécondité, ces femmes nous « engendrent » par leur vie, à vivre pleinement la nôtre. Elles nous enseignent chacune à sa façon, que chaque vie vaut son poids d’intériorité, de douceur inviolable et de force tranquille.
Entre l’agression et la prise de parole, des femmes gardent souvent un long espace de silence. La journaliste Michèle Ouimet révèle sa propre expérience dans l’article intitulé « La honte » (publié dans le journal la Presse)
http://www.lapresse.ca/debats/chroniques/michele-ouimet/201411/06/01-4816422-la-honte.php
Nous vous invitons à lire cet article dans sa version intégrale. Rarement un texte en a dit autant sur le sujet en aussi peu de mots. En voici quelques extraits :
« J’avais 21 ans quand deux hommes m’ont brutalement violée. Des hommes armés, le visage dissimulé sous un foulard. Des hommes que je n’avais jamais vus de ma vie.
L’été de mes 21 ans, j’ai perdu mon innocence et la certitude que rien d’horrible ne pouvait m’arriver. Désormais, je faisais partie des statistiques. Une femme sur trois est victime d’agression sexuelle ».
« Comment sort-on d’un viol aussi brutal ? Différente, changée pour la vie. Changée parce qu’on doit désormais vivre avec la peur. »
On aimerait une suite à cet article, ne fût-ce que pour apprendre comment cette jeune femme, Michèle Ouimet, a pu ensuite devenir la journaliste que l’on connaît, celle qui ose s’exprimer avec courage sur la place publique, celle qui affronte quotidiennement la peur lors de reportages risqués à l’étranger.
Michèle a su résumer en quelques mots les « émotions entremêlée » dont témoignent de nombreuses femmes après une agression :
Dans la logique des choses, chacun pourrait s’attendre à ce que ce soit l’agresseur qui ressente, ne fût-ce qu’après coup, de la honte et de la culpabilité. Honte d’avoir posé un acte répréhensible, honte d’avoir abusé d’une personne, honte de se montrer à ce point dominé par une pulsion sexuelle, coupable d’avoir fait du mal à l’autre, d’avoir méprisé son libre choix, d’avoir imposé une intimité non voulue, non désirée.
Or c’est l’inverse. Comme si tout ce que l’agresseur est obligé de nier en lui, pour pouvoir poser un tel geste, est violemment transféré sur la victime.
En plus d’être agressée, la victime se retrouve avec la triple charge des émotions négatives que l’agresseur évacue : la peur, la culpabilité, la honte.
« Honte d’être une victime. »
« Qui a envie de se retrouver devant un juge et un avocat qui posent des questions comme si la femme violée était une criminelle ? »
Et cet omniprésent sentiment de culpabilité…
« En quoi pouvais-je être responsable des gestes criminels de ces hommes ?
Même après 40 ans, je ne comprends pas. Mais le sentiment est là, puissant, envahissant. »
Et aussi cette sorte de complicité par défaut du silence si souvent partagé par la victime et l’agresseur.
« Je me suis sentie coupable de mon silence. »
Nous vous invitons, à la suite de Michèle Ouimet, à vous faire porteur de parole. Pas tant pour accuser, que pour tenter de comprendre, toutes et tous ensemble, cette épouvantable méprise, cette profonde trahison du don de l’intimité humaine, et ce faisant de l’amour.
Qu’est-ce qui pousse un agresseur à profaner sa propre intimité et dignité? Qu’est ce qui fait qu’encore aujourd’hui, même dans nos sociétés dites «libres et ouvertes », tant de victimes continuent à porter seules et en silence le poids de la honte et de la culpabilité?
Et au-delà de la violence, de la peur et des ressentis, qu’est-ce qui fait qu’une personne se transforme et, plutôt que chercher à profiter de son prochain, devient source de réconfort, de confiance et de paix pour les personnes qui l’entourent?
Écrivez-nous !
accueil@antennesdepaix.org
Lire les notes, sources et articles consultés dans notre dossier sur l’élimination de la violence envers les femmes ainsi que sur la résilience.
En voici un aperçu :
Marguerite Barankitse, prise dans la violence du génocide, a transformé la vie de milliers d’orphelins en ouvrant les maisons Shalom au Burundi. Cette enseignante qui aurait, toutes les raisons de cultiver des ressentis de colère et de haine suite à ce qu’elle l’a vécu, affirme pourtant : « Celui qui tue est la première victime de son geste. On ne peut pas condamner un homme, seulement son geste ». Elle ajoute que « Toute vie est sacrée, même celle du criminel. »
« 12 jours d’action pour l’élimination de la violence envers les femmes »
Notre appel se situe dans le contexte de cette campagne qui se déroule du 25 novembre au 6 décembre.
Femmes autochtones – Parmi les manifestations de la violence, signalons qu’au Canada, « plus de 1186 femmes autochtones sont disparues ou ont été assassinées au cours des 30 dernières années.
Toujours dans notre dossier, toute une série de liens sur le sujet :
Statistiques de l’ONU à propos des femmes: mariages forcés, harcèlement sexuel, viols en contexte de conflit, traite des femmes, etc. Attaques à l’acide. Violence conjugale: Une campagne pour recueillir les témoignages de victimes de violence conjugale.
25e anniversaire de la publication Violence en héritage? La violence conjugale et familiale est malheureusement un phénomène persistant. Lire ou relire la brochure Violence en héritage? du Comité des affaires sociales de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec, 1989.
Une autre histoire de résilience au sujet de la violence faite aux femmes, celle du Dr Denis Mukwege à qui l’on vient de décerner le prix Sakharov. Denis Mukwedge s’est spécialisé dans la prise en charge des femmes victimes de viols collectifs.
Quelques autres exemples inspirants de femmes résilientes.
Marie-Sol St-Onge, artiste-peintre québécoise, a perdu des membres après avoir été victime de la mangeuse de chair.
Olivia Giles, avocate, peut maintenant accomplir plusieurs gestes quotidiens à l’aide de prothèses et d’outils, après avoir perdu mains et jambes suite à une méningite. Elle a fondé l’ONG « 500 Mille » pour équiper des jeunes africains amputés.
Emmanuelle Després. Sortie de l’intimidation elle a pris la parole lors d’une manifestation qu’elle a organisée à Trois-Rivières et elle se réjouit de la tenue d’un Forum sur l’intimidation au Québec.
Les liens pour chaque item sont affichés dans notre dossier
Lire les prières de T. Linotte et de Marie-Hélène.
Quelques extraits des participations reçues suite à notre appel au sujet de la violence et de la résilience :
Tolérance?
un poème de Rita Amabili
Si Amnistie parle de toi jeune fille aux yeux verts
C’est qu’on a dépouillé ton cœur et déposé l’enfer
Dans ton corps mille fois privé, on perpétue le mal
Et le conflit se continue comme s’il était normal
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Un partage de Féa sur la place du « féminin » dans nos vies, que l’on soit une femme ou un homme…
Au sujet de l’appel pour l’élimination de la violence faite à l’égard des femmes, il me semble que nous pourrions dire : « pour l’élimination de la violence faite à l’égard du féminin »… parce que le féminin est souvent agressé bien avant que ne le soit la femme, et non seulement par l’homme mais aussi par la femme elle-même.
Lire la suite dans notre section « Prise de parole »
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Invitation de Monique Hamelin à signer la pétition de la FFQ pour obtenir une commission itinérante… dans notre nouvelle page dédiée à la présentation de pétitions.
APPUYONS LA DEMANDE DE CRÉATION D’UNE COMMISSION QUÉBÉCOISE ITINÉRANTE SUR LA VIOLENCE SEXUELLE
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« J´ai fait de la peine à ma mie
Elle qui ne m´en a point fait
Qu´il est difficile d´aimer… »
Pourquoi ce refrain m’est-il venu en tête dès l’instant où j’ai mis mon pied hors du lit? Serait-ce parce que dans les journaux et sur le web, on entend sans cesse des histoires où les relations humaines ont été déloyales, où les escroqueries se sont faites alors que les détrousseurs regardaient franchement leur victime dans les yeux, se faisant souvent passer pour des amis intimes ou des professionnels honnêtes?
Peut-être aussi parce que tant de couples se font et se défont autour de moi et que les histoires du cœur finissent trop souvent sur un sol vallonné, tourmenté, laissant les protagonistes meurtris de différentes façons?
Lire la suite du « doux chagrin » de Rita Amabili, une réflexion vivante sur des paroles de Gilles Vigneault.
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Un grand merci pour vos participations à cet appel, nous gardons ce thème ouvert, n’hésitez pas à nous envoyer d’autres partages!
accueil@antennesdepaix.org
Une réponse sur « Femmes, au-delà de la violence, la résilience »
Fortement impressionnée par la mouture finale… C’est « plus grand que nature »!
Les illustrations (couleurs, formes, personages) suscitent des émotions aux divers moments du parcours; le rythme (les liens favorisent alternance heureuse entre références, témoignages, prières). Une vision d’ensemble qui devient une ressource…
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