Rebelle, de Kim Nguyen

APPRIVOISER REBELLE

Une recension du film « Rebelle » du cinéaste québécois Kim Nguyen

Une illustration de Colette réalisée d'après une des images du film "Rebelle"
Une illustration de Colette réalisée d’après une des images du film « Rebelle »

Le thème des enfants soldats est très dur car il est contre-nature. Un enfant est un être à protéger. Le fait d’utiliser des enfants comme soldats montre jusqu’où l’humanité est à l’envers d’elle-même. Il est nécessaire d’en parler pour prendre conscience de ces réalités. Pour ce faire, j’ai revu le film Rebelle du cinéaste québécois Kim Nguyen, réalisé en 2012, sur la triste situation des enfants soldats. Rebelle devient un excellent prétexte pour en parler.

À ma grande surprise, le fait de décortiquer le film, d’écouter attentivement les dialogues, de prendre le temps de visionner chaque séquence a ouvert de plus en plus un espace en moi. Je ne m’étais pourtant pas préparée à me protéger des images ou des situations trop douloureuses. Généralement, les scènes de violence me traumatisent et même l’évocation de la violence m’est insupportable. Pourtant ce film m’a même passionnée. Pourquoi?

J’ai commencé à voir un embryon de réponse à cette question en réalisant que j’étais profondément touchée par la beauté des paysages, la nature, les bruits de la nature, par les visages, les mouvements du corps, la musique. J’ai commencé à comprendre que la beauté de la vie transcendait l’horreur. C’est comme si une joie profonde s’éveillait dans mon être. Je me dis que le réalisateur a façonné ce film à partir de son coeur, car son film est porteur de quelque chose de transcendant.

Rebelle aurait pu être tout à fait insupportable à regarder vu les réalités qui sont évoquées, mais la poésie du réalisateur et le point de vue de Komona, l’héroïne du film, nous permettent « d’écouter » l’histoire de ces enfants africains. Bien entendu, il s’agit d’une œuvre de fiction, mais l’œuvre est d’un grand réalisme si on en croit les commentaires de la jeune actrice Rachel Mwanza récompensée par le Prix d’interprétation féminine au Festival de Berlin, qui a été elle-même une enfant de la rue à Kinshasa. Elle n’était pas étrangère aux réalités décrites dans l’histoire dont elle est devenue l’héroïne, même si elle n’a jamais été une enfant soldat.

J’avoue que j’ai sangloté à la fin du film… au dernier moment, lorsque les villageois se comportent tout simplement comme des êtres humains gentils, conscients les uns des autres… C’est à la fois tout petit et banal mais j’ai réalisé combien c’est grand!

Marie-Claude, avril 2015

Le SCÉNARIO

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Une illustration de Colette réalisée d’après une image du film « Rebelle »

Le film Rebelle, c’est l’histoire que Komona, jeune adolescente de 14 ans, raconte  à son enfant à naître.  Réalisé par le canadien Kim Nguyen dans la forêt et les villages de la République Démocratique du Congo, l’œuvre met en scène la vie des enfants soldats.

Le drame s’ouvre sur des images d’un village étalé sur les bords d’une rivière paressant sous le soleil soporifique d’Afrique équatoriale, avec la voix de Komona enceinte : « Un jour tu vas sortir de mon ventre, c’est sûr, alors il faut que je te dise comment je suis devenue un soldat avec les rebelles. Écoute bien quand je te raconte mon histoire, parce que c’est important que tu saches c’est quoi la vie de ta maman avant que tu sortes de mon ventre, parce que quand tu vas sortir, je sais pas si le bon Dieu va me donner assez de force pour t’aimer. »

Le village est attaqué par les rebelles qui kidnappent tous les enfants, dont Komona alors âgée de 12 ans. Les rebelles déciment son village. On la force à tuer ses parents avec une kalachnikov; c’était ça ou les voir mourir sous la machette d’un des rebelles.  Le réalisateur ne montre jamais les horreurs directement. Tout est évoqué avec beaucoup de sensibilité sans enlever quoi que ce soit de la douleur ou de la souffrance qui est vécue.

Bientôt les enfants qui servent de porteurs aux rebelles, recevront chacun une mitraillette lors d’un rituel dans la forêt. On leur dit qu’ils doivent prendre la kalachnikov comme leur nouveau père et leur nouvelle mère : « Vous ne devez jamais jamais  jamais perdre votre arme! » On fera goûter aux enfants la sève magique qui les droguera et leur permettra d’endurer les affres de la faim et l’horreur de la guerre. On sent que les enfants transfèrent tranquillement leur loyauté aux chefs de la bande malgré leurs exactions envers leurs familles. Ceux-ci les nourrissent, les dirigent, les « éduquent », les droguent; ils leur donnent une nouvelle famille.

Pour compenser la terreur des fusillades auxquelles elle participe, Komona voit les fantômes des morts qui sont massacrés. Bientôt les fantômes de ses propres parents la hantent constamment. Le spectateur voit les fantômes tandis que la beauté des images et la grâce des mouvements se superposent au tragique de la situation. Cet aspect magique du film ne discrédite en rien son réalisme.

« Quand on prend la sève magique, on peut avoir des visions, on voit les fantômes, ça m’aide beaucoup pour le travail, parce que comme ça, je ne vois plus la viande rouge qui coule. Je vois les fantômes qui marchent dans la forêt. Il y a plein de fantômes ici, tu peux pas croire… trop de fantômes, même quand je dors, je vois des fantômes dans ma tête. »

Ces mots de Komona témoignent du fait que les blessures sont profondes. Comme dans bien des situations tragiques, les enfants-soldats trouvent souvent des moyens de survivre en recréant leur univers intérieur.

Comme elle voit les fantômes et qu’elle est la seule à avoir échappé aux pièges tendus par les soldats du gouvernement, Komona  est considérée comme le porte-bonheur et la sorcière du Grand Tigre Royal, chef des rebelles.  Il semble croire que grâce à ses visions, elle lui fait gagner toutes ses batailles.

 

Coltan, rituels et massacres

Une illustration de Colette réalisée d'après une image du film "Rebelle"
Une illustration de Colette réalisée d’après une image du film « Rebelle »

Chaque matin dans le camp du Grand Tigre, le chef des rebelles. Komona doit lui raconter ses rêves. Ensuite, elle et les autres enfants passent la journée à transporter des « petits rochers noirs » que les rebelles appellent du coltan. Elle ne peut pas dire pourquoi exactement, mais elle réalise que le coltan est très important pour faire la guerre et que même un soldat rebelle a été tué un jour pour en avoir volé un peu.

Le quotidien des enfants, ce sont les massacres de soldats du gouvernement, des rivalités internes réglées à coup de machette ou de kalachnikov. Mais dans le camp les enfants jouent, voient des films violents, dansent et rient, se racontent des histoires autour du feu. C’est ici que nous rencontrons le personnage qui s’appelle Magicien.

Ce jeune albinos d’environ 15 ans a beaucoup de charisme et il a un don de conteur. Un soir, il « lit » une histoire aux enfants alors qu’il regarde en fait un livre d’instructions pour faire fonctionner un appareil vidéo. Cette image souligne le fait que les enfants soldats sont très vulnérables, car sans instruction ils ne peuvent saisir la réalité du monde dans lequel ils évoluent. Pendant que les regards des enfants sont rivés sur Magicien, le chef Grand Tigre tue l’un de ses soldats qui l’a probablement trahi. Ce geste meurtrier n’a pas échappé à Komona. La violence est si omniprésente autour des enfants qu’elle est banalisée.

Un soir, elle surprend Magicien en prière. Il est devant une sorte d’autel qu’il a installé devant sa couche. Il lui montre un paquet d’amulettes attachées les unes aux autres, c’est la protection des ancêtres, lui explique-t-il. Ces amulettes (plumes, pattes de poules séchées, coquillages aux formes exotiques, etc.) ont une grande importance dans ce monde terrifiant. Elles sécurisent ceux qui les portent. En fait, Magicien lui en offre une qu’elle devra garder toujours sur elle. L’amitié entre Magicien et Komona se révèle petit à petit à travers les gestes de la vie sordide qu’ils mènent ensemble.

Les enfants montent la garde du camp et boivent de la sève magique. Un jour, alors qu’ils montaient la garde autour du camp, raconte encore Ramona à l’enfant qu’elle porte, « il est venu beaucoup de soldats du gouvernement qui ont voulu voler le coltan du Grand Tigre. Alors j’ai pris ma kalach (comme appelle affectueusement Komona son arme) et on a gagné la bataille même s’il y avait plus de soldats devant moi que de cheveux sur ma tête ». On assiste alors à une scène de sauvagerie débridée des jeunes rebelles.

La prochaine scène met en évidence la loyauté des enfants envers leur chef. À la fin du carnage, Magicien propose à Komona et à un autre jeune de partir ensemble, de s’enfuir du camp. Le plus jeune refuse, consterné devant l’invitation de fuir. Il est loyal à « Papa Grand Tigre ». Il pointe son arme sur Magicien qui lui dit : « Non mais je rêve, tu vois ce gri-gri, c’est ma protection et c’est toi qui va mourir plutôt que moi si tu tires.» Le jeune hésite, mais le respect du gri-gri est le plus fort, et il s’en retourne au camp tout seul.

 

L’épreuve du coq blanc

Commence alors pour les jeunes gens une période d’errance à travers divers villages africains que l’on sent bien incrustés dans la forêt. La nature est omniprésente dans le film. Magicien finit par avouer à Komona qu’il est amoureux d’elle et la demande en mariage. Komona se rappelle ce que son père lui avait dit de répondre à ceux qui la demanderaient en mariage : on ne marie pas une fille simplement comme ça. Il devra lui donner un coq blanc, alors seulement elle pourra se marier.

La recherche d’un coq blanc devient le fil conducteur d’une nouvelle séquence. On se moque gentiment de Magicien chaque fois qu’il parle d’un coq blanc. Sachant qu’il désire se marier, les villageois s’esclaffent en lui disant que c’est vraiment très difficile d’en trouver… même si tout le monde semble en posséder un, même les vieilles mamies chargées de garder le poulailler.

Komona et Magicien finissent par voler des vêtements qu’ils trouvent sur une corde à linge et rangent leurs fusils dans une toile cirée que Magicien porte avec lui. Ils survivent grâce à toutes sortes de stratégies et de trucs pour soutirer de l’argent à des personnes pour manger. Magicien est quasiment découragé devant la difficulté de trouver ce fameux coq.

Un jour, un homme donne un espoir à Magicien non sans avoir posé ses conditions. Il amène les jeunes jusqu’à un village d’albinos. Cet homme puis le chef du village exigent chacun une amulette et une somme importante pour lui trouver un coq blanc. Magicien a ce qu’il faut. Le chef du village lui donne alors le coq blanc tant attendu. Le jeune homme l’offre à Komona qui le reçoit avec bonheur. Les deux jeunes gens sont alors mariés.

Les jeunes ados repartent en moto avec l’homme aimable et ils arrivent enfin dans le village de l’oncle de Magicien. Celui-ci l’accueille d’un air sévère en lui demandant : « Tu as fini de faire la guerre? » Magicien lui présente Komona comme sa femme et remet à son oncle le paquet contenant les mitraillettes.

 

À l’amour comme à la guerre

Une illustration d’Eda réalisée d'après une image du film "Rebelle"
Une illustration d’Eda réalisée d’après une image du film « Rebelle »

Les deux jeunes gens sont accueillis comme des membres de la famille chez l’oncle de Magicien qui est le boucher du village. Komona raconte qu’il gardait toujours un seau vide à côté de lui quand il coupait de la viande, « parce que chaque fois qu’il coupait la viande avec sa machette, ça lui faisait penser à ce qui était arrivé à sa famille et il avait envie de vomir. Je ne te dirai pas ce qui est arrivé à la famille parce que tu ne m’écouteras plus, tu vas faire comme si t’as pas de trous dans les oreilles. » La réalité des villageois n’est pas déconnectée de la réalité des enfants-soldats. Toute la société souffre de la violence.

Tout à coup, alors que les jeunes sont dans les bois, arrivent les hommes du Grand Tigre Royal qui viennent chercher la sorcière du Grand Tigre Royal. « C’est pas une sorcière, dit Magicien aux rebelles, c’est ma femme. » Très courageusement, il tient tête au chef et à une trentaine d’hommes. Il est désarmé. Le chef insiste pour dire qu’il repart avec la sorcière du Tigre Royal. De nouveau on impose à Komona de tuer son bien-aimé avec la mitraillette. Magicien lui dit : « Komona tu es ma femme, sois heureuse». Elle est entrainée par le rebelle et un autre achève Magicien à la machette. L’oncle de Magicien repart avec son cadavre dans les bras.

Komona a maintenant 14 ans. Elle vit de nouveau comme une guerrière dans le camp des Tigres. On voit son acharnement meurtrier.

« Ça fait déjà deux ans que mon commandant m’a arrachée de mon village pour faire la guerre. C’est lui qui t’a planté dans mon ventre pour me faire vomir.  Je me demande si c’est parce que tu es un bébé rempli de poison que je vomis comme ça. Mon commandant il m’a marié, parce que la fille avec laquelle il couchait obligé s’est fait tuer à la kalach. Alors il fallait que mon commandant choisisse une autre fille pour coucher-obligée avec lui. »

Il n’y a personne dans cet univers sordide pour accompagner cette jeune fille dans l’aventure de porter la vie.

Le boucher invite Komona à rester avec lui et sa femme. Elle est comme leur fille et il lui apprendra à garder les chèvres. De nouveau une période d’accalmie pour Komona. Le coq blanc fait toujours partie de la basse-cour de son oncle. Mais les cauchemars continuent de la hanter, signe que les dommages post-traumatiques laissent des séquelles terribles.

Komona sent qu’elle doit enterrer ses parents pour que cessent ses cauchemars mais il y a sa grossesse qui avance et qui l’oblige à rester chez le boucher. Malgré tout l’amour et le soutien qu’elle reçoit de sa nouvelle famille, Komona est persuadée qu’elle doit enterrer ses parents avant qu’elle ne mette au monde son enfant, sinon les mauvais esprits vont venir le punir pour tout ce qu’elle a fait de mal, tout comme les mauvais esprits ont puni son mari Magicien parce qu’elle l’avait épousé avant d’enterrer ses parents.

 

La délivrance

Une illustration de Colette réalisée d'après une image du film "Rebelle"
Une illustration de Colette réalisée d’après une image du film « Rebelle »

Komona voit une prêtresse qui lui dit que pour se débarrasser de la sorcellerie qui l’habite, elle doit beaucoup prier Dieu et demander pardon afin que l’esprit de Komona retourne en elle.  Cette nuit-là, somnambule, elle manque d’étouffer sa tante tant les cauchemars sont puissants. Elle finit par sortir de la maison en pleine nuit en courant, alors que son oncle adoptif la cherche partout. On voit la force de l’amour de la famille, le soutien et la loyauté dont sont capables les êtres humains, même devant des situations extrêmes comme celle-ci : une enfant traumatisée, qui a participé à de nombreux massacres, qui est vulnérable à cause de ses cauchemars et qui est tout près d’accoucher. L’oncle l’appelle désespérément alors qu’elle se sauve pour atteindre enfin son village où elle pourra enterrer ses parents.

Komona est dans une barque, ses contractions ont commencé. La jeune fille finit par toucher terre sur une des rives de la rivière pour mettre au monde son enfant.

La scène est magnifique, empreinte de tendresse et de pudeur. Le doux clapotis de l’eau de la rivière accompagne cette scène lumineuse. Komona lave son bébé avec douceur. Dieu a répondu à sa demande, elle aime son enfant.

Komona arrive enfin devant son village déserté.  Elle porte son enfant dans les bras. Le fantôme de ses parents l’attend. Cette scène est tout à fait paisible, il fait soleil, et Komona se met à la recherche des ossements de ses parents.

Tout à coup, elle tombe sur un peigne de sa mère et elle trouve une chemise de son père. Elle chante en pleurant « pars, pars papa… pars, pars maman…», tout en ensevelissant ces objets sous le sable chaud. Ses parents sont finalement enterrés et les fantômes s’éloignent avec un léger sourire.

« J’ai décidé de t’appeler Magicien, comme mon mari qui est mort. J’espère qu’un jour tu vas devenir courageux et fort comme lui. »

Dernière scène du film, Komona marche sur le bord d’une grande route. Un camionneur s’arrête et lui demande où elle va. Elle dit qu’elle va chez son oncle le boucher. Le camionneur l’invite à monter à l’arrière avec les autres même si elle n’a pas un sou. Une grosse mamie prend le bébé pendant qu’un homme aide Komona à monter à l’arrière et que d’autres l’aident à s’installer confortablement. Komona peut se laisser bercer par la route et dormir un peu. La communauté est là à nouveau. Elle s’en retourne avec son bébé chez son oncle le boucher.

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Dessins-aquarelles d’Eda, inspirées d’images du film « Rebelle »

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 Le FILM

Titre                     Rebelle

Durée                   90 minutes

Réalisateur         Kim NGUYEN, canadien (4e long métrage)

Coproduction     Marie-Claude Poulin et Pierrre Evne de l’Item 7, et Kim Nguyen de Shen Studio

Distribution        au Canada : Métropole Films, Montréal

à l’international : Films distribution, Paris

et disponible en DVD et VSD

Les COMÉDIENS ET PERSONNAGES du film

Rachel Mwanza                Komona   dite la sorcière

Mizinya MWINGA            Grand Tigre Royal, chef suprême des rebelles

Alain lino Bastien             Commandant rebelle

Serge Kinyinda, alias Eminen        Magicien, albinos de 15 ans

Ralph Prosper                   Boucher du village oncle de Magicien

Didi Uwamahoro             Narratrice

Starlett Mathata              Mère de Komona

Alex Herabo                      Père de Komona

Les enfants qui ont joué dans ce film étaient pour la plupart des enfants des rues de Kinshasa.

PRIX ET MENTIONS

2012      Festival de Berlin – Ours d’argent à Rachel Mwanza, Meilleure actrice pour Rebelle

2013      Vancouver Film Critics Circle – Meilleure actrice dans un film canadien pour Rebelle

2013      Prix Écrans canadiens – Meilleure actrice pour Rebelle

2013      Prix JUTRA – Meilleure actrice pour Rebelle

2013      Trophées francophones du cinéma 2013 – Meilleure actrice pour Rebelle

 

 Le RÉALISATEUR Kim NGUYEN

Né à Montréal en 1974, il a fait des études de cinématographie à l’Université Concordia et à l’Université de Montréal. Il enseigne par la suite les arts cinématographiques et la scénarisation à l’Institut de création artistique et de recherche en infographie (ICARI) et au Collège Jean-de-Brébeuf à Montréal. Particulièrement intéressé à la scénarisation et à la photographie, il a réalisé

trois courts métrages : La route (1997), Soleil glacé (2000), Le gant (2004)

quatre longs métrages :

Le Marais (2002)

Truffe (2008)

La Cité (2010)

Rebelle (2012)

http://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/kim-nguyen/ présentation de tous ses films jusqu’à Rebelle.

Rebelle, entre réalisme et magie

En présentant les péripéties des enfants soldats, le réalisateur n’a pas négligé le rôle que jouent certaines corporations et certains gouvernements dans l’exploitation du coltan, un minerai  essentiel à la fabrication des téléphones cellulaires. Le coltan est devenu un élément extrêmement prisé et donc son prix est très élevé. Trop élevé même, car trop de personnes l’ont déjà payé de leur sang. L’exploitation du coltan est reliée de près et de loin à l’existence des enfants soldats et de toutes sortes de milices nationales ou privées. Pour cette raison, le coltan est appelé le minerai du malheur. (ceci est de Marie-Claude)

«Je ne voulais pas faire un film didactique sur les enfants soldats, poursuit le réalisateur, mais plutôt un mélange de lyrisme, de magie, de poésie, de violence, une histoire d’amour aussi»  révèle Kim Nguyen, cité par le  journaliste Normand Provencher (Le Soleil, Québec, 21 avril 2012).

Appréciation

Nguyen est parvenu à incorporer le monde des esprits à celui de l’horreur au quotidien sans rien cacher des détresses et des tueries, mais en leur adjoignant une dimension supérieure d’amour et d’occultisme.  Et les fantômes des parents, aux corps et aux visages simplement blanchis sans effets spéciaux particuliers, semblent émerger des perceptions candides de la jeune fille. Le film est une quête initiatique, à travers la guerre, également le périple des deux enfants qui traversent le pays pour trouver le rare coq blanc dans un énigmatique village d’albinos, indispensable cadeau pour leurs épousailles. Il se poursuivra au village de l’enfance, pour exorciser son mal et accepter son bébé. Le dénouement poignant dans un camion bondé ouvrira sur l’espoir, sans la mièvrerie d’un happy end traditionnel. Rebelle pousse un cri de résilience dans un film envoûtant qui refuse de réduire le Congo aux monstres qu’il enfante, mais en exaltant aussi son immense poésie.         

Odile Tremblay, Le Devoir, 21 avril 2012

Rachel MWANZA, l’actrice principale

Rachel Mwanza est une actrice congolaise, née en 1997 à Mbuji-Mayi. Elle a grandi dans une famille aisée du Kasaï oriental (RD Congo). La famille connaît de graves difficultés quand le père perd son emploi et finit par abandonner femme et enfants. Rachel vient alors habiter à Kinshasa en 2004, chez sa grand-mère, avec sa mère et deux autres enfants. Comme la situation financière se dégrade, la grand-mère profite de l’absence prolongée de la mère –partie chercher du travail en Angola – pour accuser Rachel de sorcellerie et la chasser du foyer.

Dès l’âge de 9 ans Rachel vit dans la rue et se débrouille pour survivre dans la rue parmi les enfants sorciers appelés «shegués ». En 2010, une équipe belge la recrute pour participer au tournage du film Kinshasa Kids de Marc-Henri Wajnberg. Puis Rachel, retournée vivre dans la rue, se présente au casting du film Rebelle du réalisateur québécois Kim Nguyen qui lui attribue le premier rôle. Rachel Mwanza, comédienne, connaît dès lors une surprenante trajectoire qu’elle raconte dans le livre Survivre pour voir le jour, publié chez Michalon Éditeur sous la plume de Mbépongo Dédy Bilamba.

Son interprétation est remarquée et la révèle au grand public. Rachel Mwanza devient rapidement lauréate de divers prix dans des festivals de renommée internationale, tel que le Festival de Berlin où elle reçoit l’Ours d’argent de la Meilleure actrice en 2012. Elle participe également à la 85e cérémonie des Oscars, où le film Rebelle est nominé dans la catégorie  du « meilleur film en langue étrangère ». En 2013, en acceptant le Prix JUTRA de la Meilleure actrice, elle déclare : « C’est pour les enfants de la rue ». En 2014, elle joue dans le documentaire Rachel, la star aux pieds nus d’Hélène Magny et Pierre Mignault.

La Cendrillon africaine

« Avant d’être ostracisée, chassée de chez elle à coups de pierre, la petite fille aura subi la torture indicible d’une séance d’exorcisme hallucinante. Mais ce que son histoire révèle surtout, c’est l’effrayante déstructuration des familles dans ce pays aussi potentiellement riche que ruiné. C’est le dévoiement de la légendaire notion de solidarité africaine qui n’est plus qu’une excuse pour laisser ses enfants à des proches malveillants, bigots et cupides. C’est l’effrayante soumission des enfants à un autoritarisme dévastateur. «Chez nous, les enfants doivent obéir et se taire», résume Rachel qui entonne soudain, dans le café parisien, un hymne traditionnel désuet rappelant les devoirs des plus jeunes envers leurs aînés.

À travers l’histoire de Rachel, c’est une société en perdition qui s’impose sans faux-semblants. Le malaise est tel que les autorités de la RDC sont les seules à ne pas avoir voulu célébrer le miracle de son succès inattendu. La jeune fille a même du mal à faire valider par son pays natal la proposition de l’Unesco qui voudrait faire d’elle une ambassadrice des enfants de la rue. «C’est comme s’ils avaient honte de moi et des enfants de la rue, s’offusque-t-elle, qui se sent désormais investie d’une mission. J’ai une étoile, alors je dois aider ma famille, et les enfants de la rue de Kinshasa.»                                                                                            Maria Malagardis, Le Monde, 24 février 2014

http://www.liberation.fr/monde/2014/02/24/rachel-mwanza-cendrillon-du-congo_982601

 RÉFÉRENCES

www.rebelle-lefilm.com le site officiel du film – Film disponible en DVD et VSD

http://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/kim-nguyen/ le réalisateur

http://toukimontreal.com/actualites/2012/04/14/entrevue-avec-kim-nguyen-le-realisateur-de-rebelle/

http://toukimontreal.com/actualites/2012/04/14/rebelle-le-quatrieme-long-metrage-de-kim-nguyen/

http://www.liberation.fr/monde/2014/02/24/rachel-mwanza-cendrillon-du-congo_982601

http://radiookapi.net/culture/2012/02/27/rachel-mwanza-remporte-le-prix-de-linterpretation-feminine-au-festival-du-film-de-berlin/

« Rachel Mwanza, une survivante à Kinshasa » [archive], sur la-croix.com,‎ 18 mars 2014, Marie Auffret-Pericone

« Rachel Mwanza : l’exil fragile d’une rebelle » [archive], sur tempsreel.nouvelobs.com,‎ 9 février 2014 Sarah Diffalah

http://www.la-croix.com/Actualite/Monde/Pourquoi-les-albinos-sont-ils-persecutes-en-Tanzanie-2015-03-12-1290285?xtor=EPR-9-%5B1300811815%5D Albinos en Tanzanie

http://www.la-croix.com/Culture/Cinema/White-shadow-fantomes-albinos-2015-03-11-1290019 –  Film germano-italo-tanzanien de Noaz Deshe, 1 h 55

http://fr.wikipedia.org/wiki/Coltan sur le minerai du coltan et son exploitation

http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=212539.html film Kiinshasa Kids de Marc-Henri Wajnberg, en Belgique

Le livre

Mbépongo Dédy Bilamba, Survivre pour voir le jour, Michalon Éditeur, 192 pages.
http://toukimontreal.com/actualites/2014/01/15/survivre-pour-voir-le-jour-de-rachel-mwanza-et-mbepongo-dedy-bilamba/ Plusieurs articles suggérés en supplément sur le Kasaï Oriental

 

Le documentaire Rachel, la star aux pieds nus

d’Hélène Magny et Pierre Mignault

Par Rosa Hamadouche | 8. mai 2014 |

Le documentaire Rachel, La star aux pieds nus, d’une durée de 52 minutes, retrace le vécu de la vedette congolaise, Rachel Mwanza, dans les rues de la capitale congolaise, Kinshasa. Il a été présenté, entre autres, en marge de la 30e édition du Festival international du cinéma Vues d’Afrique. Le documentaire se concentre sur la force d’une enfant qui subit quotidiennement la violence, la faim et les stratagèmes pour en sortir.

«J’aimerais mieux mourir plutôt que de retourner à la rue… Si je fais ma vie, j’aurai réussi. Si je ne fais pas ma vie je préfère mourir», dit-elle timidement, larmes aux yeux.

Dans leur film, Hélène Magny et Pierre Mignault dressent le portrait de cette battante, qui rêve de devenir star et montre aussi aux spectateurs, l’autre côté de la médaille.

https://www.youtube.com/watch?v=cXCZ3jJ94dE présentation du documentaire

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