
Qu’es-tu devenu?
Toi l’enfant que j’ai aperçu
aux frontières du désert.
J’ai entendu ton appel
dans le silence brûlant.
Ton regard a traversé mon cœur
et je ne peux plus t’oublier.
Pourquoi cette clôture qui nous sépare
et m’empêche de t’accueillir?
Et surtout,
d’où nous viennent ces nouvelles brumes tenaces
qui font que je ne te vois plus?
comme si tu n’existais plus…
…
Aux Antennes de paix, nous tentons modestement de rester à l’écoute, autant des détresses marginalisées ou oubliées que des petites initiatives d’entraide, de solidarité et de paix.
Nos « antennes intérieures » sont avant tournées vers la personne, au-delà de toute forme de frontière, peu importe la distance, peu importe l’appartenance à tel pays, ethnie ou culture.
Cependant, en ce moment, le « signal » de la présence devient de plus en plus faible, et nous avons de la difficulté à le capter. Pourquoi? Sans doute avant tout en raison des « interférences ».
Depuis l’arrivée d’un minuscule virus qui vient d’une certaine façon révéler un mal-être plus profond.
Dès que nos habitudes de vie et nos mécanismes de protection individuels ont été ébranlés par ce nouveau danger, nos sirènes d’urgence ont été activées.
Et nous ne pouvons que le reconnaître, nos organes d’information se sont ajustés à ces nouvelles priorités collectives. Depuis un an, les médias diffusent une profusion exceptionnelle de nouvelles destinées à se renseigner à et se mobiliser pour se protéger de ce nouveau virus.
Il en résulte une forme d’occultation ou de mise de côté de tout ce qui s’écarte de ce point focal.
Les grandes urgences humanitaires causées par les conflits armés, l’extrême pauvreté et la détérioration de l’environnement, pour ne citer que celles-là, n’ont pas diminué, au contraire. Et pourtant elles ont été voilées par le bruit assourdissant des sirènes de la pandémie.
Ce n’est pas nouveau, cette tendance à reléguer en dernier ce qui ne nous concerne pas directement existait déjà bien avant la pandémie. Celle-ci n’a fait qu’exacerber un penchant marqué de notre culture individualiste : celui de s’occuper prioritairement de nous-mêmes, de notre propre bien-être.
Les murs et les barbelés qui, à nos frontières, sont censés nous « protéger » de l’étranger, s’érigent sans doute en tout premier dans le regard que nous posons sur l’autre.
Et il semble que la façon la plus efficace d’ignorer la réalité de l’autre soit encore de l’enfermer dans un concept abstrait, comme par exemple une statistique. Pourquoi? Peut-être parce qu’une statistique, comme une évaluation, une étiquette ou un jugement n’a pas véritablement de visage ou de corps. C’est une représentation désincarnée qui, même si elle s’affiche comme étant véridique, se substitue insidieusement à la réalité de la présence.
Après un an de pandémie, toute personne informée sait très bien que les grandes détresses de l’humanité n’ont pas disparu. Les statistiques sont là pour le confirmer. Sauf que ces détresses ont en quelque sorte été relativisées, voilées et embrumées, nous donnant l’illusion d’être moins urgentes.
Sans images, sans témoignages qui incarnent ces détresses, il n’y a pas de « rencontre » de l’autre, et le cœur ne s’ouvre pas.
D’ailleurs, c’est souvent à la suite d’une seule image donnant visage et corps à une détresse spécifique que l’opinion publique commence à sortir de son indifférence et à s’émouvoir d’une situation.
Aux Antennes de la paix, nous désirons explorer plus profondément l’apport de l’image et du témoignage pour percer les murs de la marginalisation, de l’exclusion et de l’oubli.
Si vous avez des images et des témoignages de personnes qui vous ont touchés, n’hésitez pas à nous les envoyer au :
C’est ensemble qu’il devient possible de dessiner un portrait plus juste et aimant de notre humanité!
Jean-Emmanuel